C’est Tim O’Reilly qui a mis le thème de l’État plateforme sur orbite en 2009, au moment où s’ouvre l’ère Obama aux États-Unis. La notion d’État plateforme a donné un nouveau souffle à la notion antérieure de gouvernement électronique (e-government).

La campagne présidentielle d’Obama est à l’époque novatrice sur le plan technologique : crowdfunding et analyse sophistiquée des données pour guider le ciblage des campagnes de porte à porte : des méthodes qui se généralisent aujourd’hui en Europe.

Tim O’Reilly défend l’idée d’un État fonctionnant d’une part moins comme une cathédrale et plus comme bazar, pour reprendre l’opposition fameuse d’Eric Raymond, et d’autre part tirant son inspiration de l’Apple Store et du succès alors tout récent de l’iPhone. La notion d’ouverture se définit dans ce cadre de pensée comme la possibilité de brancher des applications tierces sur les données de la plateforme via des API.

L’idée de l’État plateforme fait aussi son chemin en France à travers les réflexions d’Henri Verdier et de Nicolas Colin, parues sous forme de livre en 2013.

L’État possède en France une importance et un flair tout particuliers. Un accent nouveau est mis par Nicolas Colin sur la dimension fiscale des activités des géants de l’Internet, des GAFA souvent évoqués dans nos colonnes.

Mais cette dimension ne constitue qu’un aspect au sein d’un vaste sujet dont l’analyse s’approfondit continûment. La notion de plateforme s’affine. Selon Laura Létourneau et Clément Bertholet, tous deux issus du Corps des Mines, l’État doit aujourd’hui se soumettre à l’impératif de l’auto-ubérisation pour devenir une métaplateforme, une plateforme de plateformes à l’instar d’AWS. Leur récent livre Ubérisons l’État! avant que d’autres ne s’en chargent est préfacé par Xavier Niel et paraît bourré d’allusions à la saga Star Wars.

Voici la vidéo de l’intervention de Laura Létourneau lors du TEDx Issy les Moulineaux le 23 novembre 2016 à l’École de formation professionnelle des barreaux de la cour d’appel de Paris.

 

Mounir Mahjoubi semble désormais bien en place pour être le Vivek Kundra d’Emmanuel Macron. Reprendra-t-il à son compte le projet de métaplateformisation de l’État? Saura-t-il frayer une voie nouvelle évitant le terrain miné des legacy systems de l’administration? Nicolas Colin a déjà attiré l’attention par le passé sur la difficulté que rencontre l’État quand il s’agit de fonctionner comme Amazon. Comme le dit Albert Meige, le digital est bien le pharmakon des organisations ouvertes, et la recette managériale qui permettrait aux structures administratives de botter du postérieur sur le modèle de Jeff Bezos reste entièrement à inventer.

La métaplateformisation se présente ainsi comme une ambition dont la réalisation signerait par sa prouesse une nouvelle fois la grandeur de notre État. Notre nouveau Président semble déterminé à relever ce défi.

Cher Mounir, si vous lisez ces lignes, sachez que notre Conciergerie regorge d’experts en disruption digitale. Si par hasard vous vous trouviez actuellement être à la recherche d’un ou de plusieurs sparring partners intellectuels qui soient au fait du sujet de l’État plateforme, et qui soient, en même temps, complètement indépendants — votre discussion pouvant en outre par nos soins se dérouler de manière parfaitement anonyme de votre côté — sachez que nous sommes convaincus que c’est sur cette plateforme que vous les trouverez de la manière la plus efficiente.