Qui aujourd’hui ne s’accorde pas sur l’importance croissante de la part de la R&D des entreprises se déroulant hors de ses frontières ou à ses frontières ?
Du côté de la recherche en sciences de gestion, les académiciens sont dans le mouvement et s’intéressent de plus en plus à ce thème (Dahlander et Gann, 2010).
Protéiforme et existant finalement depuis toujours, l’externalisation de l’innovation a été désignée par plusieurs appellations :
- outsourced technology and research (Howells, 1999)
- lead user studies (von Hippel, 2005)
- outsourcing R&D (Howells et al., 2008)
- transnational sourcing (Mahnke, Wareham et Andersen, 2008)
- open innovation (Chesbrough, 2006; Chesbrough et Appleyard, 2007; Gassmann, Enkel, et Chesbrough, 2010).
Néanmoins, ce phénomène a connu une cristallisation sous ce dernier nom d’open innovation, quand il a été désigné et a reçu une première description par Chesbrough dans son ouvrage Open Innovation: The New Imperative for Creating and Profiting from Technology (2003).
Si cette appellation rassemble un ensemble de pratiques nouvelles et de concepts existants – tout en ne pouvant pas encore prétendre au statut de paradigme scientifique. – c’est celle qui est la plus reprise à la fois par les entreprises et les scientifiques.
Le terme « open innovation » tel que décrit par Chesbrough sert aujourd’hui majoritairement de base de référence pour la majeure partie des études qui viennent l’amender, le préciser, l’enrichir et proposer de nouvelles pistes et perspectives de recherche… Il s’agit alors d’évoquer les pratiques d’innovation qui viennent de l’extérieur de l’entreprise et vont vers l’intérieur (inbound open innovation) mais également celles qui viennent de l’intérieur et vont vers l’extérieur (outbound open innovation).
3 travaux sont considérés comme les références centrales sur le sujet :
- l’ouvrage de Chesbrough (2003),
- le livre de von Hippel sur les sources de l’innovation – téléchargeable librement (1988),
- les travaux de Cohen et Levinthal sur les capacités d’absorption (1990).
Et du côté des entreprises, l’externalisation de l’innovation (inbound) a commencé un âge d’or depuis une quinzaine d’années.
Cette croisssance de ce qu’on appelle donc désormais “open innovation”, s’explique par la rencontre de phénomènes économiques et sociaux concomitants au début de ce nouveau siècle :
- la globalisation offrant de nouveaux marchés,
- l’émergence économique de nouvelles zones géographiques accompagnée par l’apparition de nouveaux centres de recherche d’excellence,
- le développement d’outils de communication permettant de s’affranchir des distances géographiques,
- la naissance de nouveaux marchés fondés sur la valorisation des savoirs,
- le plafonnement des modèles d’innovation des entreprises 30 Glorieuses,
- la pression des marchés pour toujours plus et plus vite de produits et services nouveaux…
Il reste encore à explorer les pratiques permettant de réussir cet open innovation qui offre aux entreprises la capacité de capter et d’intégrer l’innovation venant de l’extérieur – une poignée de pionniers réussit à bien les maîtriser.
Et un champ reste à explorer : l’outbound open innovation, soit pour les entreprises, comment valoriser les savoirs développés en interne qui ne pourront devenir des innovations que portées par d’autres…
Sur l’outbound open innovation, on rejoint le concept d’ ‘utilité’ — les compétences et expertises disponibles en interne peuvent ‘servir’ autant en interne qu’à l’externe, pourquoi ne pas les utiliser comme tel. Et considérer de les mettre à disposition de l’externe, c’est d’ailleurs potentiellement un vecteur de créativité, motivation, agilité, avec les bénéfices en retour pour l’interne. Une étude de cas pertinente (peut-être ?), c’est ce que fait Philips à Eindhoven, avec Philips Innovation Services (PInS) : une ‘grappe de PhDs’ mutualisés sur les multiples divisions de Philips, et qui prennent des projets externes en plus.