Introduction

Dans le contexte perturbé de la crise sanitaire et des changements qu’elle a entraînés, il importe aux acteurs de l’innovation industrielle de collectivement garder un cap et de ne pas oublier leur raison d’être. Ce point très général est confirmé par les réactions à l’émergence subite de l’organisation hybride (certes préparée par des tendances technologiques et organisationnelles qui ne sont pas récentes). Au sein de notre écosystème de l’innovation industrielle, ce sujet, parmi d’autres, contribue à nourrir les réflexions sur la R&I du futur, notamment en ce qui concerne l’équilibre entre lieux physiques et espaces virtuels. Face à la difficulté de ces questions qui touchent tous les grands acteurs de la R&I industrielle, la recherche de synergies collectives est impérative. Ces synergies peuvent en particulier concerner les trois axes suivants : 

  1. La raison d’être et les valeurs qui guident les R&I ; 
  2. L’accélération de l’innovation dans les grands groupes industriels ; 
  3. La nouvelle articulation entre les lieux physiques et les espaces virtuels.

 

1. Y a-t-il une crise existentielle dans la R&I ?

De nombreux acteurs des R&I partagent le constat selon lequel nos entreprises et nos organisations, malgré leur taille, peuvent être  fragiles face aux crises d’un genre nouveau (aujourd’hui la pandémie, demain le climat etc.). La fragilité concerne à la fois la dimension économique et la dimension humaine. 

Simultanément, des frustrations prennent forme : questionnements sur le sens de l’activité d’une entreprise et du travail individuel, mais aussi sur les modes de travail. Le fait que les budgets de R&I soient parmi les premiers à être gelés n’est pas indifférent à cette prise de conscience, qui conduit à un désir de résilience accrue. Mais aussi de plus grande agilité.

La crise sanitaire a vu de nombreuses entreprises industrielles mettre sur le marché des solutions et des innovations pour faire face à COVID.  L’innovation peut être produit/service (nouveau produit ou produit détourné de son usage premier), organisationnelle / process, ou liée à l’utilisation des capacités industrielles de manière inhabituelle. Les exemples sont nombreux : respirateur collaboratif MakAir (CEA Grenoble + Groupe SEB), gel hydro-alcoolique (LVMH), respirateur (Valeo + Air Liquide), Decathlon (masques de plongée hacké), etc.

Au-delà de ce sursaut salutaire, la question se pose de mieux traduire les valeurs de l’entreprise (et/ou de la R&D) dans les projets et dans les organisations. Dans l’organisation hybride, le rôle des bureaux est appelé à évoluer. Quelle sera la nouvelle configuration ? Comment concilier performance individuelle et collective dans le télétravail dans un nouvel équilibre entre le physique et le virtuel ?

 

2. Comment accélérer l’innovation dans les grands groupes industriels ?

Les grands groupes continuent de s’interroger sur les ingrédients de l’innovation rapide. Comment faire pour réunir autour de la table les bons décisionnaires, pour fonctionner en “équipe commando” en favorisant les “circuits courts” ? Comment s’assurer que toutes les ressources et fonctions de l’entreprise sont mobilisées ? Comment favoriser les initiatives et les innovations porteuses de sens et conformes à la raison d’être profonde de l’entreprise ?

Malgré les idées reçues, l’innovation rapide n’est pas réservée aux startups : la mise sous tension des grands groupes lors de la crise sanitaire a permis de « déplacer des montagnes » et d’avancer vite, en bousculant et en transformant les organisations et les process existants.

Dans tout cela, il convient de ne pas oublier que la raison d’être de l’innovation va au-delà de la génération de nouveaux produits et nouveaux services. La fonction R&I peut aussi être ce qui permet d’injecter de la résilience dans l’entreprise, afin de contraindre cette dernière à se réinventer en permanence et rapidement. Pour cela, il faut une attitude de “corporate hacker”.

Mais la capacité d’accélérer l’innovation est avant tout une question de performance qui implique des choix concrets dans l’architecture et dans l’organisation physique et virtuelle de l’activité de R&I. Quelle est la taille minimale pour que ça fonctionne ? Quelle est la taille maximale ? Quid des performances environnementales en tant que facteur d’attractivité et d’acceptabilité pour l’avenir ?

 

3. La nouvelle organisation hybride

Les nouveaux outils numériques ouvrent la perspective de gains de performance importants dans la R&I. Mais il s’agit d’un terrain qui n’est pas encore bien balisé. Il ne n’agit désormais plus seulement de recourir à des substituts de collaboration en présentiel, mais bien d’optimiser les pratiques, en tirant parti des avantages et en minimisant les faiblesses des canaux virtuels.

Il est aujourd’hui possible de conduire avec succès des ateliers virtuels. La co-création multifonctionnelle, souvent perçue comme compliquée, voire impossible, est en fait rendue possible grâce aux outils numériques. Les instruments virtuels tendent même à être aujourd’hui perçus comme étant supérieurs aux post-its classiques. Même dans le cadre des workshops en présentiel. Les instruments digitaux boostent en effet massivement la participation, en favorisant la libération de la parole. 

Ces nouveaux instruments digitaux posent néanmoins de graves questions de cybersécurité et de souveraineté. De plus, leurs avantages ne dispensent pas de réfléchir à la meilleur façon de les utiliser, et de les combiner avec les méthodes présentielles. Comment favoriser à la fois les échanges et le travail « concentré » ? Quelles populations doivent travailler ensemble et pourquoi? Ces questions incluent aussi des sujets tels que l’organisation des bureaux. Quelle est la surface optimale de ces derniers dans une organisation de R&I hybride ?

Les bouleversements survenus lors de la crise sanitaire ont mis en évidence le besoin d’adaptabilité des organisations. Mais ils ont aussi suscité un vif désir d’anticipation des changements à venir, en se projetant dans le temps long (20 ans) !

 

Conclusion : rejoignez le mouvement !

Dans tous les secteurs industriels, la fonction R&I est confrontée aux pressions mais aussi aux attentes et aux espoirs d’un monde bousculé à tous les niveaux. La perspective transversale, en regroupant les réflexions issues de secteurs variés, peut aider pour identifier les vrais sujets et les meilleures pistes et bonnes pratiques pour les gérer. Grâce aux convictions partagées par les acteurs de la R&I industrielle, elle peut aussi permettre la construction et la défense collective de nouveaux narratifs techno-industriels, qui seraient très bienvenus dans le contexte actuel.

Parmi les sujets que nous avons rapidement évoqués dans ce qui précède, lequel vous paraît être le sujet de synergie le plus pertinent et utile ? Faites-nous rapidement part de votre opinion ici !