Les sociétés ouvertes semblent être le terreau nourricier des organisations ouvertes.
Situation actuelle des sociétés ouvertes
Notre époque dicte à chacun de se prendre en main, et l’égoïsme généralisé auquel ce précepte peut conduire produit des effets mortifères. Les marchés se globalisent, pas la décence. Peut-être est-ce cette réalité qui entraîne un refus des partis politiques, ce qui serait conforme à la thèse de Naval Ravikant.
Mais ce refus ne serait ni nouveau, ni original. En France, François Mitterrand n’a-t-il pas en son temps vidé son parti de son contenu pour le transformer en machine à prendre le pouvoir?
La disruption de l’État est plus banale dans l’histoire qu’on ne le pense, dès lors que les sociétés ouvertes semblent particulièrement exposées à un étiolement de leur substance civique. Quand survient la précarité matérielle, de telles sociétés peuvent facilement devenir la proie des démagogues.
La grande crainte suscitée par la démagogie est que son triomphe nous emporterait vers une fermeture totalitaire en rupture avec la tradition de notre territoire national et de nos choix économiques et géopolitiques. Si la démagogie est guidée par une vision de court terme des enjeux politiques, alors le défi central et existentiel des sociétés ouvertes ne serait-il pas de parvenir à installer le souci du long terme au cœur de la démocratie?
Un défi qui semble héroïque.
Rôle du nouveau Président
C’est dans ce contexte que surgit la figure d’Emmanuel Macron, à laquelle nous nous sommes déjà intéressés dans ce blog.
Emmanuel Macron a suivi une ligne fondée sur la trinité suivante : protéger, rassembler, oser. Trois thèmes pour maintenir la France sur un chemin de crête posé entre deux abîmes :
- La sclérose des partis fonctionnant dans un vide civique où erreraient des citoyens atomisés.
- L’autoritarisme fondé sur des aventuriers charismatiques, qui apportent en apparence un remède au problème de l’égoïsme généralisé, mais au prix de l’apparition d’un problème d’instabilité économique et géopolitique.
Ce qui éclairerait deux aspects complémentaires du phénomène Macron :
- La cohésion par l’idée mobilisatrice de la « nation start-up » formulée pour surmonter la contrainte budgétaire et rendre possible d’émergence de l’État méta-plateforme. L’idée de la nation start-up s’oppose à la fois à l’emprise du slogan « il faut plus de moyens », devenu creux, et à l’immobilisme.
- La cohésion par un récit collectif : le Président a ainsi récemment manifesté une conscience aiguë du déficit français et européen de récit et de héros, donc d’histoire et de conscience du passé.
Pas d’organisations ouvertes sans sociétés ouvertes
Comment les organisations ouvertes parviennent-elles à rester des organisations, à générer de la cohésion entre leurs membres? Reprenons la liste des traits caractéristiques des organisations ouvertes :
- Câblées pour le digital
- Stratégie de plateforme
- Talent à la demande
- Centrée sur le consommateur et les interfaces utilisateurs
- Mission inspirante
Une plateforme digitale fabrique une forme de cohésion implicite et minimale à travers le coût du passage à une autre plateforme. Toute participation à une plateforme constitue aussi un investissement que des participations ultérieures permettront de rentabiliser.
Le talent à la demande suppose l’ouverture et la liberté individuelle. Dans un système où les ressources humaines seraient gérées de manière fermée, il ne pourrait pas y avoir de talent à la demande.
La mission inspirante semble jouer un rôle clé dans ce dispositif de cohésion.
Peut-il y avoir une mission inspirante sans inscription dans une continuité historique ? On voit immédiatement que même en supposant que l’on s’accorde à répondre par « non » à cette question, il n’est pas évident de déterminer dans quelle source de continuité historique la mission inspirante puiserait une partie de son élan.
À moins que la réponse ne soit, en fait, complètement évidente?
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Article inspiré en partie par un entretien avec Jacques Attali, qui ne souhaite finalement pas être mêlé à nos réflexions.